La Dispute: dignes héritiers d’At The Drive In?

photo: Kurt Coffy

Ha le fameux fantasme (paradigme?) du hardcore intello. A chaque génération, son challenger dans la catégorie du rock crié aux références lettrées et aux préoccupations politiques et sociales. Dans la 3ème (?) génération du post-hardcore américain, La Dispute, originaire d’un trou (Grand Rapids, Michigan) s’est distingué avec une musique riche en rebondissements, assez intemporelle, qui s’appuie malgré tout sur les grands frères avec une personnalité assez solide pour pouvoir éviter le travers du groupe de fan qui s’engouffre dans le revival emo 2000.

Avec Panorama, premier long format pour le GROS label indie Epitaph, La Dispute sort un efficace disque de punk hardcore intelligent qui a assez d’atouts pour ouvrir quelques nouvelles portes au genre, tout en respectant les grands présupposés d’une musique désormais balisée par des groupes dans le monde entier.

Si on n’échappe évidemment pas à l’intro bleep bleep gazeuse (un travers fatigant qui pèse sur des disques de tous styles ces temps ci sans que l’on en comprenne l’intérêt), le premier morceau Fulton Street I nous invite en terrain connu: vocalises murmurées/criées typiques du screamo moderne, nappes de guitares et une certaine science de la grandiloquence. Le chant rappelle fortement celui de Cedric Bixler, en particulier quand il articule les « machineries ». Hommage inconscient?

Au fond ça n’a pas d’importance car La Dispute quitte rapidement les  chemins balisés d’un Relationship of Command 2.0 pour enrichir sa palette musicale allant plutôt piquer des ambiances chez Modest Mouse, Decemberists ou Bright Eyes.

Il n’y a probablement pas grand chose de pire que du rock véner avec des arrangements chiadés. Et pourtant sur Rhodonite & Grief, la sauce prend parfaitement, probablement grâce à une approche sobre et pas viriliste pour un sou. A tel point, qu’on se surprend un instant à songer à une version hardcore du TNT de Tortoise.

Evidemment, pas question non plus de perdre le public de teenagers américains des banlieues blanches. Tous les ingrédients du disque emocore de 2019 sont présents: breaks singalongs, claps, passages écorchés vifs et malaise adolescent. Footsteps At The Pond, le morceau le plus radio friendly du disque, est un joli pot pourri de Thursday, At The Drive In et Explosions In The Sky.

Panorama, inspiré par (c’est le groupe qui le dit) Nabokov et Joanna Newsom, est un disque réussi et homogène, auquel on adhère sans difficulté pour peu qu’on ait une appétence pour le rock’n roll crié et breaké. On aurait juste envie parfois que ça dégueule un peu, que la voix déraille, que ça sature par ci par là.

Malgré son infâme pochette, La Dispute vient de sortir un des bons disques du genre. Je pensais lui accoler l’étiquette « screamstream » personnellement.

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