Les fondateurs du label Hands In The Dark parlent des disques qu’ils auraient rêvé de sortir

Dans Un bestiaire de bouquinistes (que je recommande vivement), Aaron Cometbus se penche sur le monde étrange de ceux qui dealent des livres d’occasion, avec ses codes, ses stars, ses parias, ses drames et ses épiphanies. Il dit aussi quelque chose de très vrai: la presse en général ne parle des librairies que quand elles sont en crise ou fermées. Et cette idée a fait inévitablement écho à la couverture que les médias ont fait cette année du sort des librairies et disquaires en France. C’est dans la crise qu’on s’est rendu compte de l’importance de ces véritables passeurs des oeuvres qui rendent la vie plus supportable. En regard de ce mouvement plutôt positif (les shops indépendants ont pu à peu près supporter la tempête), il m’a paru assez étonnant qu’on entende si peu parler les éditeurs et des labels indépendants, des chaînons pourtant majeurs dans le milieu culturel et artistique.

Hands In The Dark fêtait ses 10 ans en 2020 (pas de chance, mais ils sont « encore là » comme le beuglerait le Suprême). C’est un label que je suis depuis longtemps et dont j’admire à la fois la démarche artistique, esthétique et les qualités humaines. Plutôt que de leur proposer de parler de leurs productions, j’ai eu envie de leur demander quels disques ils auraient rêvé de sortir. Leur sélection commentée est à leur image: curieuse, humaine, en mouvement. Elles sont rares les maisons qu’on suit les yeux fermés. Hands In The Dark en est une et je ne peux que vous conseiller d’aller chiner chez vos disquaires préférés ou sur Bandcamp à la découverte de sorties toutes plus enthousiasmantes les unes que les autres. (La morale de cette digression étant, vous l’aurez sûrement compris, qu’il faut profiter des choses pendant qu’elles sont aussi pleines de vitalité que le label de Morgan et Onito). A eux la parole.

ONITO

Cette sélection, sans ordre particulier, a été difficile mais cet exercice s’est avéré assez fun! Je me suis basé au final sur quelques facteurs essentiels pour aiguiller mon choix. 

Le premier étant que je considère évidemment ces albums comme des chef d’œuvres: je me replonge régulièrement et sans me lasser dans leurs univers respectifs, chaque écoute me transportant autant qu’elle suscite en moi fascination et excitation de manière mystique.

Le deuxième facteur essentiel est que j’ose espérer que Morgan partage mon avis! Ou du moins qu’il soit partant pour qu’on défende ensemble ces albums, condition sine qua non pour les frapper du logo hands in the Dark. S’ils s’avèrent au final assez variés en termes de proposition musicale, ils correspondent, me semble-t-il, aux visions singulières et fortes que nous nous efforçons à mettre en avant avec le label depuis plus de 10 ans.

Oneohtrix Point Never – Replica (2011, Mexican Summer/Software)

 Nico – Desertshore (1970, Reprise Records)

 

Lumerians – Transmalinnia (2011, Knitting Factory Records)

 

Moondog – Moondog (1969, CBS Records)

Fabulous Diamonds – Commercial Music (2012, Chapter Music)

 

MORGAN

Battiato – Fetus (1972, Bla Bla)

Un classique qui ne me quitte jamais très longtemps. Le premier disque d’une très longue série. Pop, électronique mais tellement plus que ça. Des mélodies incroyables et un sens du collage sans égal.

Broadcast – The Noise Made By People (2000, Warp)

Difficile de choisir parmi les disques de Broadcast… Ce groupe reste une référence pour nous deux. C’est sublime et d’une élégance rare.

Bitchin Bajas – Bitchin Bajas (2014, Drag City)

Depuis 2010, le duo devenu trio au fil du temps, sort des disques à tour de bras et multiplie les collaborations passionnantes (Bonny ‘Prince’ Billy, Natural Information Society). Ce double album de près de 80 minutes est à mon humble avis un grand disque de musique minimaliste. La bande son idéale du dimanche matin.

Infinite Body – Carve Out The Face Of My God (2010, Post Present Medium) 

Sans vraiment que je n’arrive à mettre des mots dessus, ce disque m’a toujours complètement fasciné. Je le trouve à la fois puissant, abrasif et hyper mélancolique.

Raul Lovisoni / Francesco Messina – Prati Bagnati Del Monte Analogo (1979, Cramps)

L’avant-garde italienne à son apogée.. Une oeuvre qui laisse la place aux silences et à la réflexion. D’une beauté indicible.

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