Buddy Records, quatre garçons dans le vent et un chien dans le ciel avec des diamants

Nous sommes en 2015 lorsque Viktor et Victor, qui se connaissent depuis 6 ans alors, mettent de côté le tumblr où ils postaient des playlists à thèmes pour se consacrer à un autre projet. Avec Charles, guitariste et chanteur du groupe parisien nommé Joujou Jaguar, ils avaient envie de créer leur propre label. Une histoire qui commence donc à trois. Enfin, à quatre : trois hommes et un corniaud sans race, Buddy (copain en anglais), que Viktor récupère à la SPA. De sa gueule à laquelle on ne comptait plus que trois dents se dégageait une mauvaise haleine et c’est sans doute ce que son maître et ses acolytes lui trouvaient de plus attachant. « Il fallait trouver un nom et « Buddy’ s’est imposé naturellement. Ce chien, notre pote mélomane, était participant intégral de cette aventure. Il avait la gueule de l’emploi, on trouvait l’idée qu’il soit patron et figure d’un label géniale. » 

Avec ce label, ils commencent par produire des compilations sur cassettes. Une version plus aboutie de leurs playlists à thèmes, en somme. Ils contactent de jeunes artistes qui leur plaisent et leur demandent un titre ou deux. N’ayant que peu de moyens, tout repose sur la bonne volonté de chacun. Les amis d’amis s’occupent du graphisme, contents d’aider et tout le reste est fait main. Les revenus touchés pour la première cassette paient les frais de la suivante et ainsi de suite. Un drôle de choix, à l’heure où personne ne possède plus de lecteur cassette, que Victor explique ainsi : « C’est à la portée de tout le monde, il n’y a pas besoin de passer par des intermédiaires, ce n’est pas trop cher à produire et puis on peut en produire en petite quantité« . 

N’oublions pas le son de ce média, charmant et surtout très adapté aux productions lo-fi qu’ils adorent. Suite à deux premières compilations intitulées Fried et Meatballs où l’on retrouve Kaviar Special ou encore Quetzal Snakes, ils sortent un premier split réunissant les rennais Flashers et les parisiens Bad Pelicans. Puis un deuxième avec Dr Chan et Thee Maximators et un premier EP, celui d’En Attendant Ana. Sûrement la meilleure preuve du flair qu’ils ont pour dénicher les nouveaux talents puisque le jeune groupe connaît depuis une ascension fulgurante. Ils font venir The Homesick des Pays-Bas pour un concert, une autre première. Avec de tels noms, on croirait les cerner mais les buddies n’appartiennent pour autant à aucune chapelle. Ils piochent autant dans le rock garage ou psychédélique que dans le shoegaze, la cold-wave ou la dream pop. On compte ainsi dans leur rangs : Tape Worms, Os Noctambulos, Pappy, Kitchen’s Floor, Belmont Witch pour ne citer que ceux-là.

Le frère de Viktor, Grégoire, alias Daniel, les rejoint en 2017, année où Buddy décède. Globalement dégoûtés par le concept classique du label, les quatre évoluent toujours peu plus vers une activité plurielle et 100% do it yourself. L’idée ultime ? Tout faire de A à Z avec les artistes plutôt que de passer par de nombreux intermédiaires. De l’enregistrement, à la release party en passant par la communication presse, la vente chez les disquaires et le deals des dates et des tournées. Une philosophie que Charles justifie en ces termes : « On fait tout de nos propres mains, c’est une fierté. » Ils ne se privent pas non plus d’enchainer les dj sets réguliers, notamment à l’Espace B où on les croise souvent et qu’ils appellent « la maison« . Car Buddy Records c’est avant tout une histoire d’amitié à quatre, cinq si l’on compte le défunt petit Buddy. Une belle amitié qu’ils honorent en rodant de concerts en concerts, sur Bandcamp et Soundcloud, à la recherche de la prochaine claque qu’elle soit Australienne, Néerlandaise ou Rennaise. 

CHAYMA MEHENNA

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